samedi 15 avril 2017

Retour dans l'Histoire : PHNOM PENH et l'horreur des Khmers Rouges

Du 7 au 9 avril 2017 :

Visite de la prison S21 à Phnom Penh


Nous nous arrêtons pour 2 jours à Phnom Penh, la capitale. Nous logeons au Cyclo Hotel, une guest house vraiment sympa à côté du Palais royal et du centre ville.

Afin d'en apprendre un peu plus sur l'histoire de ce pays, nous décidons d'aller visiter la prison Tuol Sieng ou S21, l'un des 200 lieux de détention et de torture durant le génocide des Khmers Rouges. Cette visite nous a permis de mieux connaître cette période sombre de l'histoire du Cambodge qui a durée de 1975 à 1979, moment où les vietnamiens ont envahi le pays.



Comment vous racontez cette Horreur ??? Il n'y a pas de mot pour traduire ce qui s'est passé ici il y a un peu plus de 40 ans. En visitant la prison S21, qui était autrefois un lycée, on ressent une sensation de mal-être qui va bien au-delà de la sensation d'oppression, comme si ces lieux étaient hantés par toutes ces âmes torturées... C'est horrible.
Au fur et mesure de la visite audio guidée, on pénètre dans l'atmosphère inhumaine de ce lieu d'atrocités et on découvre avec effroi l'histoire sanglante de ce peuple, qui n'est pas si ancienne que ça ! Ce que nous avons vu, les récits et les témoignages que nous avons entendus ne laissent place qu'à une seule explication possible : la Folie ! La folie d'un homme au départ, Pol Pot, qui était persuadé que son peuple pouvait s'auto-suffire par l'agriculture et que tous ceux supposés être des opposants au régime (et ce pour n'importe quel motif) devaient être éliminés. Cette folie s'est ensuite étendue à une poignée d'hommes, qui ont instrumentalisé des jeunes gens illettrés (enfants et adolescents), et les ont endoctrinés en faisant ressortir le côté le plus bestial de l'homme, le plus sadique aussi en les entraînant tout d'abord à torturer des animaux pour ensuite appliquer ces tortures aux hommes.

Les Khmers rouges enfermaient à S21 aussi bien des jeunes que des personnes âgées, des femmes, des enfants et même des bébés et parfois des familles entières. Ouvriers, intellectuels, ministres, diplomates cambodgiens mais aussi des étrangers qui malheureusement passaient par là, s'y côtoyaient. Le simple fait d'être enseignant, de parler une langue étrangère, d'être religieux ou même simplement de porter des lunettes était suffisant pour être considéré comme intellectuel et donc "à exterminer" ! Les conditions de détention ôtaient toute dignité humaine aux prisonniers, ils étaient appelés par un numéro et non plus par leur nom, ils étaient nus, entassés et enchainés au sol les uns aux autres par rangées de 6 ou 9, sous-alimentés, et ne pouvant faire aucun geste sans en demander l'autorisation aux geôliers.
Ce régime est devenu de plus en plus paranoïaque jusqu'à s'emprisonner et se torturer entre-eux !!!

cellules individuelles des prisonniers "haut de gamme", cependant la majorité des prisonniers étaient enchainés à même le sol.

Comment en sont-ils arrivés à massacrer leur propre peuple ?


Les cambodgiens sont un peuple qui a atrocement souffert, après 5 années de guerre du Vietnam, où ils ont vraiment trinqué (les américains ont déversé sur le Cambodge autant de bombes qu'ils n'en ont déversées durant toute la seconde guerre mondiale dans le Pacifique !!), voilà qu'arrive le régime des Khmers rouges.
Le 17 avril 1975, Phnom Penh tombe aux mains des Khmers Rouges dirigés par Pol Pot et un groupe de communistes fanatiques (on devrait même dire de cinglés !). Dans un premier temps, à leur arrivée dans Phnom Penh, les Khmers sont accueillis comme des libérateurs, une foule les accueille et les acclame : le peuple voit en eux la fin de la guerre. Mais à peine 3 heures après leur entrée triomphante dans la ville, le vrai visage des Khmers apparaît. Ils exigent auprès de toute la population d'évacuer la ville pour aller "se réfugier" dans les campagnes. Le prétexte donné à la population était qu'un nouveau bombardement américain était imminent sur la ville. Ceux qui refusaient de partir étaient liquidés sur le champ. C'est ainsi que ce jour fatidique, environ 2 millions de personnes se retrouvent en exode. En l'espace de quelques heures, Phnom Penh devient une ville fantôme. Toutes les ambassades ont été évacuées, seuls les ressortissants français étaient encore dans l'ambassade française pour être protégés et évacués.
C'est ainsi que la folie khmère s'inspirant du maoïsme démarre. L'idéologie khmère, s'il y en a une, se veut la révolution des paysans contre le capitalisme et les bourgeois, citadins des villes. c'est ainsi que le régime forcera tous les citadins à aller travailler dans les champs sans même qu'ils ne sachent comment cultiver. Tous les intellectuels, ingénieurs, médecins, professeurs, instituteurs, etc... en fait toute personne susceptible de réfléchir, et donc ayant ou risquant d'avoir des opinions politiques différentes, était éliminée. Les dirigeants khmers rouges haïssaient toute forme d'intelligence. Critiquer l'Angkar (="Organisation") peut être sanctionné par la mort tout comme avoir les cheveux long. Pour économiser des cartouches lors des exécutions, ils fracassaient les têtes à coups de pioche puis égorgeaient leurs victimes. Une véritable barbarie sans nom.
Il ne restait que les illettrés, ne sachant ni lire ni écrire, un peuple vivant dans la terreur, réduit à l'esclavage dans les champs et rationné en nourriture (2 portions de bouillis par jour). Ils travaillaient avec des charrues car le régime refusait toute forme de modernisme, toutes les machines étaient détruites ou laissaient à l'abandon. Les usines ne fonctionnaient plus par manque de personnel sachant faire fonctionner les machines. L'école était réduite à des chants et de l'endoctrinement. Le pire de tout cela, c'est que les Khmers, qui ont commis toutes ces exactions, n'étaient que des gamins de 16 à 22 ans, plus malléables et faciles à convaincre.

la "potence" servait d'instrument de tortures
Ce pays a été mis au niveau 0, un anéantissement complet d'une société toute entière. Un tiers de la population cambodgienne a été ainsi exterminée.

Il faudra attendre 1979 pour que le Vietnam envahisse le Cambodge et déloge les Khmers Rouges du pouvoir. Cette horreur sans nom a duré 4 ans sans qu'aucun gouvernement étranger ne réagisse... Nous qui disions quelques années plus tôt : "Plus jamais ça !"
Pire, les Occidentaux n'ont reconnu le nouveau régime politique mis en place par les Viêt que 7 ans après l'exil de Pol Pot ! C'est totalement hallucinant.


Et après ? 


C'est peut-être le plus incompréhensible de l'Histoire, peu de personnes ont été jugées pour ce génocide, les premiers procès datent de 2009, soit 30 ans après ! Et comble du comble, le premier ministre actuel est un ancien dirigeant Khmer Rouge repenti, qui protège encore les meurtriers de l'époque.

Sur le plan psychologique, le pays tout entier a vécu un profond traumatisme, nombreux sont ceux qui ont souffert des années après du TSPT (= trouble de stress post-traumatique).


Une grande leçon de vie :


Cette visite de la prison S21 nous a énormément choqués. Toutefois, plus nous côtoyons ce peuple khmer, plus nous découvrons un peuple souriant avec une chaleur d'accueil énorme. Malgré toute cette souffrance endurée, ce peuple s'est relevé dans la plus grande dignité, la bienveillance, et il se reconstruit jour après jour...

Nous conclurons sur l'extrait d'un témoignage d'une rescapée de la prison S21 : "Tout ce qui nous arrive dans notre existence, ce n'est pas forcément bien, ce n'est pas forcément juste, mais en ressassant notre colère à cause de cette injustice, nous nous faisons souffrir nous-même. La méditation permet de réveiller en soi cette partie de notre Être qui sait distinguer le Bien du Mal, et ainsi ne plus nous laisser ronger par le doute et l'insécurité. On se rend alors compte que c'est bien cette vie-là qu'il faut mener et non pas une vie de haine, de cupidité et de rage."

En mémoire aux victimes

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